08 avril, 2006





LA MUSIQUE A KHARTOUM, SOUDAN - mars 2006

Legende des photos:

1 - Avec notre ami Molhe, membre du groupe de Dafalla
2 et 3 - Dans le village dingo, joueurs de wuaza
4 - repetition sur le toit du CCF quelques heures avant le concert
5 - joueur du Oud au centre national pour les instruments traditionnels

Lorsque nous nous apprêtons à nous rendre au Soudan, pour la première fois nous échappons à ces symptômes-fantômes qui refont surface à chaque fois que nous quittons un pays pour un autre, et qui préludent au déracinement du vagabondage: grosse angoisse, mal de tête et sentiment d’être tout petits et seuls au monde. Cette fois-ci, nous savons où nous allons, pour avoir été déjà invités dans ce coin d’Afrique l’année dernière. Et cela change tout! Quelle joie d’être accueillis à l’aéroport, quel confort d’être pris en main du début jusqu’à la fin, quelle chance de retrouver ici des têtes connues et amies…

Notre séjour a Khartoum, organisé par le centre culturel français, se passera comme suit:
- première semaine: répétitions avec les musiciens traditionnels soudanais, à l’issue de laquelle nous donnerons un concert « métissé » sur le toit du CCF.
- deuxième semaine: ateliers à la faculté de musique de la capitale, conférence sur la sonate baroque et quatre jours d’ateliers avant le concert final a la fac.

C’est Dafalla (grand prêtre de la musique traditionnelle soudanaise qui nous avait fait forte impression l’année dernière) qui prend les commandes de cette première semaine, et qui nous propose un planning digne d’un ministre de la culture en campagne: chaque après-midi une fois notre répétition quotidienne terminée, nous enchaînons visites de musiciens aux quatre coins de Khartoum: Orchestre National de musique traditionnelle, Orchestre Nationale des Femmes, meeting soufi, musiciens de l’ethnie Dingo, etc ... Un riche aperçu de l’étendu de la musique au Soudan, plus grand pays d’Afrique qui compte près de 500 ethnies, et donc presque autant de langues et de musique. Qui l’eut cru! Et quel drôle de coup du destin qui nous amène à connaître plus en profondeur ce pays que nous ne pouvions même pas situer sur une carte de l’Afrique!

S’il fallait en relater un seul, le moment fort de la semaine est incontestablement la visite du village ou vie la minorite dingo. Après un bon bout de route et quelques kilomètres de pistes a bord du tacot bringuebalant qui sert de voiture à Dafalla pour gagner ces faubourgs éloignés du centre-ville, nous arrivons enfin dans ce "club" de l’ethnie dingo. Le rendez-vous était pourtant arrangé par Dafalla: mais personne semble nous attendre… Le club en question se résume à une cour ensablée, où quelques chaises rafistolées s’entassent sous une taule ondulée. Les trois chaises rembourrées qu’on nous amène ainsi que quelques boissons fraîches nous font vite comprendre qu’il nous faudra patienter quelques instants avant de pouvoir réunir la dizaine d’instrumentistes nécessaires à reconstituer le wuaza, cet ensemble de flutes traditionnelles. Il n’y a pas foule comme on dit. Je passerai les détails de l’attente qui n’en valent guère la peine, pour vous emmener une bonne demi-heure et de nouvelles boissons plus tard: la moitié du village se trouve réunie à l’ombre de la taule ondulée, la bonne dizaine de musiciens requise est bien là, mais nous attendons maintenant la personne qui a les clés du local où sont rangés les instruments. En Afrique, mieux vaut prendre son temps et ne pas être trop à cheval sur les horaires, les choses se font lentement mais se font finalement, « il n’y a pas de feu au lac » ici non plus (et d’ailleurs pas de lac non plus).

La clé arrive enfin. Commence alors une incroyable cérémonie dont les rites se mettent en place progressivement: les wuaza (longs tuyaux évasés) sortent un à un de leur cachette et constituent chacun une partie d’un gigantesque orgue à taille humaine. Quelques pas de danse esquissés timidement, un pouet et deux tuts, et en un déclic, la grosse artillerie musicale se met en branle. En deux pas et trois mouvements c’est la farandole, des cris, des sons, des rires, des torses bombés de fierté, une pulsation exaltante fait même sortir un guerrier et sa lance du local (je jette un regard de plus en plus inquiet a Nat), c’est maintenant une village et demi qui est réuni dans cette cour… On nous colle une flûtiotte dans le bec, et après avoir vite ravalé notre stupéfaction, Nathalie, Dafalla et moi sommes happés dans la ronde. Chacun responsable de sa petite mission: une note et un rythme qu’il doit jouer au bon moment pour donner vie à cette œuvre collective monumentale. Le résultat sonore de cette mosaïque est impressionnant: une musique polyrythmique et répétitive, dont la force a fait dansé les plus plus réfractaires, sans l’ombre d’une réticence…


Raphael.

1 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Un instrument traditionel biensur. Chacun des douze musiciens est responsable d'une flute, d'un rythme qu'il repete. Il y a douze tailles de flute differentes, ce qui rappelle des tuyeaux d'orgue. Mais je doute que ces flutes soient pliables! A moins que tu n'aies confondu avec ma "languette" pliable comme l'appelle Nathalie, que tu peux voir en photo sur le blog, dans le chapitre intitule QUELQUES CLAVIERS POUR L'INDE.
Bises, R.

22 avril, 2006 22:10  

Enregistrer un commentaire

<< Home