19 avril, 2006






PÂQUES À CACHI - 14, 15 et 16 avril 2006

Après la petite inquiètude de savoir où passer Noël, suivait tout naturellement celle de savoir où passer Pâques. Ces rendez-vous donnés par le calendrier chrétien, vécus dans nos chaumières familiales dans la plupart des cas, renvoient les isolés à leur isolement. L'Argentine, pays catholique réputé pour la ferveur de ses pratiquants, promettait cependant un rendez-vous qu'il ne fallait pas manquer.

Après quelques conseils et informations prises auprès de M. l'ambassadeur, c'est la province de Salta, au nord du pays en direction de la Bolivie, qui est finalement retenue comme destination pascale. A l'issue de notre concert, ce choix se trouve vite confirmé par les recommandations d'une des invités de l'ambassadeur:

- "Vous partez demain à Salta? Oh, il faut absolument que je vous donne le contact de mon amie Jackie, une femme artiste anglaise qui habite Cachi, un petit village perdu dans les montagnes, et qui se fera un plaisir de vous recevoir!"

Cachi. 2400 mètres en altitude. Quelques centaines d'habitants. Indiens pour la plupart. Une église, simple et charmante, dans laquelle les habitants se relayent pour prier en ce vendredi saint. Une église, comme tant d'autres sur ce continent, qui nous met un peu mal à l'aise lorsque nous voyons les indiens prier, parce qu'elle nous rappelle à quel prix les missionnaires ont imposé la religion catholique. Une église au centre de Cachi qui draine tous les villageois et dicte les étapes-clé de ce week-end pascal.

Le vendredi soir, un chemin de croix grandeur nature sillonne les ruelles, avec comme fond sonore des bouts d'évangile crachés d'un haut-parleur grésillant. Les latinos ne négligent aucun détail: l'habit blanc du christ, maculé de sang, rappelle les représentations ultra-réalistes qui ornent les églises d'Espagne et du Portugal. Tout y est: les chutes, les coups de fouet, les larmes, jusqu'à la spectaculaire mise en croix sur la place centrale. Deux crucifiés attendent Jésus -torses nuds et grelottant, qui se fait hisser sur une immense croix à la lumière de quelques projecteurs.

Le samedi, c'est relâche pour la troupe de comédiens. En guise d'exutoire à tant de souffrance accumulée et partagée, un Juda-pantin en jeans pendouille pendu sur un fil, exhibé tel un trophée guerrier à 3 mètres du sol. Il sera flambé à la nuit tombée... Curieuse coûtume vengeresse pour un dieu sensé être redempteur et misericordieux!

Il faut dire qu'ici, la religion semble s'être accomodée des pratiques et traditions locales. Ainsi, lorsque Jackie rend visite à une "sorcière-guérisseuse" pour traiter une allergie de peau, elle en ressort avec des instructions mêlant Ave Maria, cierges et feuilles de coca!

Felices Pascuas!
Raphaël.