13 mai, 2006

LES LAMPIONS MAGIQUES EN TOURNÉE - Bolivie avril-mai 2006

Oh! que cela fit du bien de retrouver nos amis... Nous attendions ce moment depuis de longues semaines à décompter les jours. Lorsque nous les avons enfin aperçu descendre de l'avion à l'aéroport de La Paz ce 23 avril, nous avons brandi notre pancarte de bienvenue multicolore, et notre excitation n'a fait qu'un tour. Chez Laura aussi visiblement: nous ne lui avions pas encore dit bonjour qu'elle avait déjà disparu dans la salle d'urgence de l'aéroport, un masque à oxygène sur le nez pour essayer d'amortir ce choc émotionnel! Il faut dire que l'aéroport situé à plus de 4000 mètres d'altitude ne fait pas de cadeau sur ce plan-là.

C'est donc notre ensemble LATERNA MAGICA qui se trouve ainsi reconstitué, le temps d'un séjour bolivien et de quelques concerts à travers le pays...

La chronololgie du récit en image de ces aventures musicales se fera, une fois n'est pas coutume sur ce blog, de haut en bas:

LA PAZ - début du séjour...

La Paz est une ville impressionante. Insaisissable et indomptable, elle nous coupe le souffle à chaque coin de rue. Ses ruelles escarpées se grimpent les unes sur les autres, offrant ça et là, le temps d'un coup d'oeil, un dégagement vertigineux sur un pan de montagne, où les maisons et immeubles semblent réquisitioner le moindre lopin de terre pour composer cette immense mosaïque de brique et de broque.

Les femmes portent des chapeaux-melons sortis d'on ne sait quelle époque de notre vieille Europe. De leur côté, les hommes plus discrets, observent le spectacle de la rue derrière leurs lunettes sombres. Les magasins étendent sur le pavé lissé leurs tissus colorés et leurs pulls en laine d'alpaca ou de lama. Les cafés, thés ou matés de coca soulagent ici-haut les quelques maux liés à l'altitude: souffle court et mal de tête.

L'atterissage dans notre hôtel nous fait l'effet d'un coussin amortisseur. Calme et confort: notre suite au Ritz nous offre la possibilité de vivre une petite vie de famille recomposée. Espace et volupté. Bains à volonté. Appartements de ces dames, et chambre de ces messieurs. La salle à manger décorée donne le ton et nous sert de salle de répétition.

Piano-languette et violoncelle, les pipeaux en partielles. Transcriptions, diapasons, partitions. Reprises et réunions. Les repas en bas. Les petits déj. en pyj. Entre deux temps et trois mouvements d'une sonate bolivienne, les sofas du salon nous servent à nous relaxer. Détente et reprise d'haleine...

Mais bientôt le galop du naturel reprend de plus bel, et l'appartement familial ordonné se transforment en coloc délurée ou les frippes frappent l'espace traversé. A la vue de ces haillons colorés, les femmes de ménage, dans leurs régulières apparitions, repartent de nos pénates de plus en plus penaudes.

Horreur... Il est bientôt temps de plier bagages. Ou d'en racheter une supplémentaire pour les plus dépensiers...

Le premier concert se passe dans la -trop grande- salle glaciale du Centro Sinfonico. Les breuvages chauds que l'on nous donne avant de jouer parviennent tout juste à nous réchauffer, et quelques minutes avant de rentrer sur scène, Laura dort à points fermés, allongée de tout son long contre un radiateur...Une première page se tourne. Nous nous tournons à nouveau vers les hauteurs et l'aéroport, avec en perspective le festival "Misiones de Chiquitos", et les retrouvailles avec mes parents qui nous attendent à l'aéroport de Santa-Cruz. Quelques dizaines de minutes de vol et autant de sueurs froides nous font survoler -raser...- les plus hauts glaciers, des montagnes désertiques, puis les plaines boisées de l'Amazonie. Nous voilà arrivés à bon port: Santa-cruz de la sierra!

SANTA-CRUZ de la Sierra - 28 avril 2006

Changement de décor, changement de climat. La forêt amazonienne n'est pas loin, le climat quasi tropical nous fournit son lot de cocotiers et de sueurs chaudes. Il y a bel et bien deux Bolivies: celle d'en-haut et celle d'en-bas.
Santa-Cruz, première étape du festival "Misiones de Chiquitos" et point de départ de notre tour dans les missions. Mais avant de partir, quelques mots d'explications: les jésuites, missionnaires présents aux XVII et XVIIIèmes siècles dans cette région d'Amérique latine, ont construits des villages (appelées "réductions"), regroupant des familles d'indigènes autour d'une église, leur apprenant entre autres choses à jouer et parfois écrire de la musique, dans le but de les convertir en profondeur... C'est ce double héritage culturel baroque, sur le plan de l'architecture et sur celui de la musique, qui a vraisemblablement nourri et suscité la création de ce gigantesque et extraordinaire festival de musique.

SAN JAVIER - 30 avril 2006

Après notre premier concert à Santa-cruz, nous grimpons dans un bus pour de longues heures qui nous amènent à San Javier quelque part dans la nuit. Ce trajet nous permet de faire connaissance avec notre gentille accompagnatrice-volontaire, Marie-Esther, bolivienne bilingue chargée de rendre notre séjour encore plus agréable!
La route nous semble être plutôt une piste... l'oeil peine è se fermer, secoué par les nombreux nids de poules et autres ponts sur la rivière Kwaï.
Et pourtant, il faut assurer notre deuxième concert à 11 heures le lendemain matin! La nuit est courte, la messe est dite jusqu'à 10h30, le temps de repérer les lieux chargés d'histoire. Le temps aussi de ne pas accorder le clavecin...
Où sommes-nous? Dans quel film ou quel siècle sommes-nous tombés, au beau milieu de la forêt amazonienne pour un concert de musique baroque!

Et pourtant tout prend sens ici. L'église émeut par sa simplicité et par sa charge historique. Quelle chance de jouer ici. Mais il faut cependant remotiver les troupes, bien fatiguées. Difficile de trouver l'inspiration, sans avoir vraiment dormi, pour un concert dominical post-eucharistique de 11h00... Laura et Nathalie hésitent même à masquer leur cernes et sortir leurs plus beaux apparâts de concert (honte à ces filles, de vraies enfants gâtées). Mais une fois sur scène et quelques secondes avant de jouer, elles aperçoivent du coin de l'oeil Shalev Ad El et Ryo Terakado (claveciniste et violoniste, professeur à La Haye) venus nous écouter quelques minutes sur la route de leur prochaine destination de concert... la simple vision de ces deux musiciens font chez elles l'effet d'un booster d'adrenalyne! Elles n'ont curieusement jamais aussi bien joué de leur vie! Comme quoi, il faut parfois vraiment peu de choses...


CONCEPCION - 1er mai 2006

Troisième et dernier concert de ce festival. Quelques heures de bus encore nous séparent de San Javier, précédente étape. Mais à Concepcion, nous avons plus de temps. Le temps de récuperer un peu, flâner dans le village, siroter quelques cocktails "Cuba libre", faire trois emplettes pour Bernard (trois! on a dit Bernard...). Le temps aussi d'aller écouter quelques concerts émouvants dans l'eglise: ensembles boliviens, choeurs et orchestre d'enfants interprétant un répertoire écrit pour leurs ancêtres au XVIIIème siècle.


La nuit approche, avec elle l'heure de notre dernier concert. Pour cette occasion, nous avons la chance d'avoir un orgue en plus du clavecin, utilisé pour le choral de Bach, et la sonate pour violoncelle de Vivaldi. Après le concert, des groupes de danses traditionnelles animent la place du village.

Avec cette soirée se termine cette incroyable aventure de concerts en Bolivie. Le bus nous ramenera à Santa-cruz le lendemain matin, le temps pour Bernard de faire encore quelques achats, et pour Laterna de se séparer pour quelques mois, avant les concerts de l'été...

Raphaël.






PASSAGE À LA TÉLÉ BOLIVIENNE - avril 2006

Nous sommes le pire cauchemard des journalistes...C'est bien connu!!!
Depuis que nous avons entamé une carrière extra-européenne (asie-amérique latine), nous avons fait tourner en bourique plus d´un journaliste à cause de nos fous rires chroniques!

Laura et moi, ne sommes décidement pas faites pour le milieu de la communication: nos langues fourchent, les siècles se mélangent, les trous de mémoire déferlent et la dislexie nous prend par surprise, le tout se terminant gutture ouverte en gloussements, laissant le pauvre journaliste à son triste sort, complètement impuissant!
BREF UN DESASTRE!
Afin de remédier à ce handicap très gênant, mettant un frein à l'expansion de notre carrière internationale, nous avons décidé de nommer Raphaël "responsable des relations publiques et de la communication" au sein de notre ensemble. Nous nous concentrerions davantage sur l'aspect esthétique, artistique et musical.

Alors que notre ensemble avait retrouvé plus de sérenité en son sein et davantage de crédit auprès des médias, un nouveau "hic"d'une importance capitale ébranla cependant sa nouvelle harmonie: notre responsable de la communication contracta un bouton d'herpès géant sur la commissure de la lèvre droite (la photo parle d'elle-même...) quelques jours à peine avant son interview avec la chaine nationale la plus importante de la télévision bolivienne.
CATASTROPHE!
Son humeur s´assombrit pour ne pas dire qu´il devint complètement insupportable. Il se renferma sur lui-même en feignant de vouloir laisser tomber ses responsabilités...

Que nenni! Nous avons agluttiné toutes les crèmes et onguants que nous pouvions trouver dans nos alentours sur la croute grandissante: bains moussants du Ritz, dentifrice, beurre de cacao, crème contre les gersures, margarine, pâte de mais, spray anti-moustique en espèrant une amélioration...
MAIS RIEN! NADA!
Les jours passent et les spasmes nous prennent déja au ventre (Laura et moi). Rien que de nous imaginer en face à face sur un plateau en "carton pâte", devant un présentateur gominé qui s´apellerait ¨Gonzalez¨.
CE NE SERA TOUT SIMPLEMENT PAS POSSIBLE DE GARDER NOTRE CALME!
L´heure est pourtant venue de nous rendre au lieu dit. Nous avons réussi à traîner Raphaël hors du Ritz, même si celui-ci est fermement décide à rester dans les coulisses!!!
Nous faisons part avec désepoir de notre problème à la responsable du plateau qui nous envoie dare-dare avec notre ami défiguré chez la meilleure maquilleuse de la maison.
Apres avoir tiré une tête de dégout à la vue de la chose, celle-ci attaque courageusement un travail de camouflage choc: pinceaux, cotons-tiges et bouts d'ouate gratouillent, appliquent et répartissent tous les fonds de teint de son étalle... Lorsque celle-ci nous montre avec fierté le fruit de son labeur, nos visages se décomposent aussitôt à la vue effroyable de ce gigantesque champignon atomique.
C´EST ENCORE PIRE QU´AVANT!
Gardons notre calme, tout n´est pas encore perdu! Nous retournons alors en meute, avec notre défaite, à la direction de la télévision bolivienne qui nous propose une ultime solution: placer Raphaël devant le bureau du présentateur en ne montrant que son flanc gauche durant toute l´interview.
SOULAGEMENT INTEGRAL...
Un sourire même s´imisce sur la bouche de notre directeur de la communication nouvellement promu, qui reprend ses esprits. Nous nous dirigeons tous vers le plateau et gagnons nos places respectives, Bulle, Bernard et moi l´instrument en main, et Raf le micro-cravatte et l'oreillette ajustée!
3-2-1 C´EST PARTI...

23h00, le soir même. Nous voila tous les quatres vautrés dans notre salon ritzien, impatients, la télé allumée...
Et lorsque finalement nous nous voyons de l'autre cote de l'ecran: c'est le fou-rire generalisé. Le chef-monteur semble s'en etre donné à coeur joie pour camoufler cette pustulance labiale, tentant le tout pour le tout: fondues enchainées, floues artistiques, découpages, recollages, dégradés et camaieux d'images, allant même jusqu'au dedoublement de la personnalité!!!

Nathalie.